Suites de conférences

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Le petit Séminaire de Ville-la-GrandUne conférence, pour moi, est toujours un événement conflictuel. La tension pendant que je prépare mes notes, les attentes que je suppose chez les personnes qui feront l’effort de se déplacer pour entendre parler de Louis Favre, ma crainte de ne pas savoir faire passer à quel point cet homme était exceptionnel par son envergure morale : ce n’est pas un moment de plaisir mais toujours un stress. Je continue pourtant, car ce qui est important vient après la conférence…

Les gens qui posent des questions ne sont souvent pas concernés de manière émotionnelle par cette période : historiens, passionnés de la période de la seconde guerre mondiale, connaisseurs qui veulent vérifier si je connais tel ou tel point de détail, personnes qui veulent raconter une fois encore un épisode de leur vie. Parfois, si la salle est petite et incite à la confidence, un témoignage bouleversant, jamais plus, chamboule l’assistance.

Cela vient après. Quand le public commence à évacuer la salle et que les auditeurs s’approchent de la table.

Les histoires familiales surgissent avec les regrets que le père ou le grand-père n’ait pas parlé de cette période où il a eu pourtant un rôle clé, rôle que ses descendants ont appris presque par hasard. On l’a si mal connu !

Les grandes douleurs, les culpabilités : « Je suis de l’autre côté », m’a dit une dame allemande qui traîne depuis des décennies ce qu’elle ressent comme une faute originelle.

Chaque fois je suis bouleversée : quoi, si longtemps après la guerre, alors que l’Europe est devenue une réalité politique et économique, le poids de la culpabilité n’a pas disparu ?

Deux générations n’ont pas connu cette période terrible et sans équivalent dans notre Histoire mais cela ne passe pas, combien de temps faudra-t-il encore ?

Les témoignages de prison indiquent très clairement que le Père Louis Adrien Favre n’en voulait aucunement à ses gardiens, encore moins au peuple allemand, il espérait que tant de souffrances et d’horreur accoucherait d’un monde meilleur.

Ce monde, c’est à nous de le construire, avec ce que nous sommes, avec nos faiblesses et notre courage. Il faut retenir les leçons du passé, demeurer vigilant car la bête sauvage reste toujours tapie dans un coin, mais il faut avancer, avec confiance et amour.

C’est la leçon que j’ai retenue de la fréquentation de Louis Adrien Favre, Missionnaire de Saint François de Sales, amateur de musique et de bonnes blagues, de théâtre et de football, poète à ses heures et dessinant comme personne, Louis Adrien Favre qui  aimait la vie et ses semblables et a fait passer l’intérêt de l’humanité avant le sien propre.

Une belle leçon à méditer.

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