La guerre, ce matin sur France Inter

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Après la guerreCe matin le général Desportes était l’hôte du 7/9 sur France Inter où il venait présenter le titre de son dernier livre que je n’ai pas retenu. Il expliquait la nécessité de la guerre et déplorait  le lamentable état de l’armée française victime de coupes budgétaires incessantes. Bien sûr. C’est vrai que l’on oublie la guerre, que nous nous sentons en sécurité dans notre pays où le fracas des bombes s’est tu depuis soixante-dix ans. C’est vrai que nous n’avons pas pris la mesure du danger de ce qui se passe de l’autre côté de la Méditerranée et que la guerre ne s’arrête jamais.

Cependant quelque chose me gênait dans le discours du général, et j’ai mis du temps à mettre le doigt dessus. C’était la fascination de la guerre. Le général a déploré qu’on ne parle plus de la guerre à ces jeunes élites qui n’ont jamais connu la conscription et pour qui le service militaire se résume à une journée folklorique. Il a parlé de grands attentats inévitables dans notre pays et a conclu son intervention par une belle formule frappée du sceau des études classiques :

La guerre, cet outil terrible et parfois légitime.

Pas un instant le général n’a parlé des civils, on sentait que c’était hors sujet, que cela ne faisait pas partie de son propos. L’armée. La guerre. Le danger. Une forme de virilité abstraite où la protection de la Civilisation passe par l’héroïsme des hommes et la qualité du matériel. Quant aux dommages collatéraux, ce ne sont que billevesées. Le discours était réaliste mais il manquait d’humanité.

Moi je m’intéresse aux civils, à ceux qui fuient les bombes et affrontent le danger, sans savoir que lorsque le silence sera revenu, ce sera peut-être encore une autre forme de guerre. Je ne peux conseiller au général de lire mon recueil de nouvelles intitulé justement Après la guerre, il ne comprendrait pas. Ce livre est issu de témoignages de ceux qui ont été victimes d’affrontements qui les dépassaient, ils étaient enfants pour la plupart d’entre eux et longtemps après « cet outil terrible et parfois légitime » continue à déchirer le tissu de leur existence.

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4 réflexions sur « La guerre, ce matin sur France Inter »

  1. Edmée

    Je te comprends parfaitement. Moi aussi forcément je suis émue par la marque de la guerre sur les civils, mais ça c’est l’histoire de l’humain, alors que la guerre est celle de l’humanité. Les deux sont parallèles et ne sont que rarement contées par les mêmes voix. Si tu penses aux milliards de gens (sans doute) victimes tout simplement de tests médicaux ou alimentaires menés à grande échelle, ou d’expériences étranges comme par exemple ces jumeaux séparés à la naissance puis mis en adoption dans des contextes différents pour comprendre le « secret des jumeaux »… ces laboratoires dont les cobayes sont humains pour … « le bien de l’humanité » ou « découvrir le processus »…

    Et que faire? L’arbre de la connaissance du bien et du mal…

    1. Nicole Giroud Auteur de l’article

      C’est très juste ce que tu écris: l’histoire de l’humain et celle de l’humanité. Pour le reste,toutes les victimes de la cupidité ou des essais cliniques plus ou moins justifiés, c’est une autre partie de l’histoire. Je ne suis pas sûre qu’il n’y ait rien à faire, surtout maintenant, où chacun est hyper connecté.

  2. Eric

    Bonjour Nicole,

    L’écriture de vos deux livres « Mission et calvaire de Louis Favre » et « Après la guerre » nous invitent à un examen de conscience sur notre humanité. On trouve les différentes facettes de l’humain et cela peut nous interroger sur le comportement que nous aurions face à la férocité d’une guerre.
    Merci de porter ces vécus d’êtres humains qui ont dû faire face à la guerre, pour leur mémoire et pour nous donner à réflexion sur notre humanité.
    Toutefois, même sans guerre dans notre pays, il y a des batailles de tous les jours pour vivre mieux ensemble et on se rend compte que ce n’est pas facile.

    Je me souviens de mon premier choc télévisuel dans mon enfance. Le mardi, il y avait cette musique lugubre en soirée annonçant les dossiers de l’écran. Un soir, c’est le film Holocauste qui fût diffusé. Cette tragédie bouleversante, choquante m’avait profondément troublé sur la nature humaine

    1. Nicole Giroud Auteur de l’article

      Bonjour Eric,
      Je suis étonnée que vos parents vous aient laissé regarder quelque chose d’aussi traumatisant pour un enfant, mais il est vrai que je ne sais pas à quel âge on peut regarder les atrocités dont l’être humain est capable.
      Bien sûr, vous avez raison, il y a tant de combats pour lutter contre l’injustice et la folie des hommes!
      Les nouvelles du recueil « Après la guerre » sont très ciblées géographiquement, même si leur message est universel. Une dame m’a écrit ceci: « Ce recueil pourra-t-il contribuer à sa manière à réconcilier la Haute-Savoie avec son histoire? Chemin encore long et difficile! »
      Comme vous le voyez, la guerre trace un sillon si profond qu’il faut des générations pour extirper le mal.
      Merci pour votre long message…

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