Archives par étiquette : Photographie

La petite fille

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Petite fille s'accrochant à la jupe de sa mère

© Vivian Maier/Collection John Maloof Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York Les Douches La Galerie, Paris

Comme j’aime cette photo de la très grande photographe Vivian Maier ! Elle a été prise il y a un demi-siècle, mais elle est intemporelle. Toutes les petites filles ou presque s’accrochent à la jupe de leur mère lorsqu’elles ne se sentent pas en sécurité, qu’il y a du monde inconnu et qu’elles ont peur de perdre celle qui est leur point de repère dans la vie.

Je me souviens de ce qui avait été un drame pour ma fille. Nous étions invitées dans un endroit inconnu pour elle, il y avait des gens qu’elles ne connaissaient pas. Elle s’était éloignée un moment, ou bien moi peut-être, je ne sais plus, et puis elle m’avait cherchée. Un enfant navigue à vue de regard, et, comme la petite fille de la photo elle s’était accrochée à ma jupe, une corolle pleine de couleurs qu’elle aimait beaucoup et qu’elle pensait à nulle autre pareille. Seulement – hasard de la vie – nous étions deux à porter la même jupe achetée à des centaines de kilomètres de distance. Continuer la lecture

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Le travailleur qui mendie

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VM 11

Il est d’une maigreur extrême, il baisse les yeux. Il ne vit pas dans la rue : sa veste est très propre, sa casquette aussi. Rien de déchiré, d’abîmé. Il est sans doute marié, sa tenue trahit les soins d’une femme qui tient à sa dignité.

Son teint hâlé de travailleur en plein air, les muscles crispés de sa mâchoire, tout indique que jamais il n’aurait dû se retrouver là, à tendre sa misérable et dérisoire sébile de carton posée sur sa canne blanche. Canne d’aveugle suite à un accident de travail ? Impossible de le déterminer.

Restent le désespoir et la honte de cet homme, ce travailleur penché en avant, le dos parallèle à sa canne. Vivian Maier s’est peut-être mise à genoux (elle est grande) pour saisir la lumière éclatante qui descend depuis le cadre d’aluminium situé à l’arrière du mendiant, continue sur la lame de sa chemise, revient sur le gobelet et la canne. Une lumière plus douce tombe sur la casquette, le col et les épaules. À sa gauche, dans l’ombre noire d’un bâtiment obscur dont la porte est ouverte, trois mystérieux trous de lumière.

Cet homme est aussi désespéré que le clown qui n’arrive pas à sourire, mais si les deux hommes sont brisés, c’est de manière différente. Le clown respirait la solitude. Notre travailleur, lui, doit porter les soins, l’amour et l’angoisse de sa compagne.

Dans les deux cas, Vivian Maier essaie de leur rendre, à travers cette lumière qui les magnifie, leur dignité laminée.

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