Dépêchons-nous, je suis en retard ! En retard, toujours en retard… dit le lapin blanc que suit Alice avant d’atterrir au pays des Merveilles.
C’est sûr, si nous parlons de Pâques, je suis en retard, mais pour les élections présidentielles ? Quel lapin va sortir du chapeau, ce dimanche ? Quel pays des Merveilles truffé d’absurdité et de folie nous attend ?
J’ai eu envie de mettre en illustration non un lapin (délire chocolatier et nœud kitsch hélas dépassé), mais le lièvre de la Fondation Beyeler.
Il est inquiétant, ce lièvre, un concentré de bronze, de puissance et de sauvagerie qui, du haut de ses deux mètres, crache indéfiniment un filet d’eau.
En réalité, lièvre et lapin appartiennent à la même espèce, et le lièvre est le plus peureux des deux. Il est associé à certaines expressions que l’encyclopédie Larousse de la fin du XIXe restitue savoureusement :
Mémoire de lièvre, qu’on perd en courant. Mémoire très courte, défaut de mémoire.
Lever un lièvre. Faire le premier une proposition : agiter le premier une question difficile.
Savoir où gît le lièvre. Connaître le secret, le nœud de l’affaire.
Le genre lièvre comprend 170 espèces dont le lièvre variable.
Céderais-je au délire obsessionnel actuel ? Je trouve que ces expressions un peu désuètes peuvent fort bien convenir à la période étrange que nous vivons. Un journal au nom de volatile lève des lièvres et sait fort bien où se niche le peureux animal. Sportifs ou pas, les citoyens perdent facilement la mémoire.
Dimanche sortira des isoloirs un lapin au gilet bleu et nous entrerons dans un autre pays. Il n’est pas sûr que les merveilles cachées dans son chapeau nous conviennent vraiment, quel que soit le mammifère rongeur.
Pour le plaisir, voici une dernière expression très connue concernant le lapin :
Poser un lapin. Primitivement, s’en aller sans payer. Par extension Ne pas tenir une promesse, un engagement spécial.
C’est sûr, quel que soit le résultat qui sortira des urnes, nous avons l’habitude des lapins.