Ella Maillart, aventurière des années 30

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Envie de vous évader en ce début de mars où l’hiver laisse enfin pointer quelques froidures ? Plongez-vous dans le récit de voyage de la Suissesse Ella Maillart Des monts célestes aux sables rouges, vous découvrirez alors ce qu’avoir froid veut dire. Ella MaillartÀ 5 000 mètres d’altitude dans le Turkestan soviétique, à dos de chameau ou à cheval, précipices et montagnes grandioses – sujets au mal des montagnes et au vertige s’abstenir – la jeune femme désire rencontrer les nomades d’Asie Centrale de l’empire soviétique.

En cette journée internationale des droits des femmes, (inutile de vous rappeler qu’il n’existe pas une journée des droits des hommes), je tiens à vous parler d’Ella Maillart, ce modèle pour toutes les femmes qui essaient de tracer leur propre chemin, cette femme de courage, cette aventurière obstinée et casse-cou des années 30 qui n’a jamais recherché l’épaule secourable d’un compagnon mais a assumé ses droits d’être humain dans les endroits les plus difficiles de la planète.

Jamais je n’ai raisonnablement songé à mener une vie rangée.

dira-t-elle plus tard à un journaliste qui l’interroge sur son extraordinaire existence. Certes…

Ella-MaillartCette fille de la bonne société genevoise (père fourreur, mère danoise grande sportive) n’a sans doute jamais rêvé chiffons et princes charmants ; elle préférait des actions beaucoup plus musclées : la jolie blonde un peu carrée d’épaules a fondé à seize ans le premier club féminin de hockey sur terre de Suisse romande ! Elle a continué en faisant de la voile à un haut niveau de compétition ; elle fut la plus jeune barreuse aux régates olympiques de 1924 où elle représenta la Suisse, et accessoirement la seule femme de la compétition. De 1931 à 1934 elle participa aux premiers championnats du monde de ski alpin dans l’équipe suisse.

En dehors du ski et de la voile, Ella Maillart aimait voyager, à la recherche d’une sorte d’absolu :

Partout je cherche le secret des hommes droits qu’un ciel clair suffit à rendre heureux,

écrit-elle dans Des monts célestes aux sables rouges qui raconte son deuxième voyage en Union soviétique. « Raconter » n’est d’ailleurs pas le terme qui convient à ses descriptions précises et sans fioritures, ce véritable document sociologique des endroits où elle se rend. Elle transcrit les dialogues avec les gens qu’elle rencontre dans un style presque abrupt, on croit entendre parler ses interlocuteurs. Elle prend du recul chaque fois qu’elle le peut en mettant ce qu’elle voit en perspective avec l’histoire passée. Car Ella Maillart a des lettres, et une grande culture, et un style bien à elle, mélange de précision, d’humour et de respect pour les personnes qui sont en face d’elle. Une certaine condescendance coloniale ou occidentale est si éloignée de sa façon de penser que ses interlocuteurs lui font confiance.

En 1930, elle a vingt-six ans et part rencontrer les cinéastes russes dont elle aime le cinéma. À ce moment elle sait déjà qu’elle pourra gagner sa vie en écrivant des livres et en exposant les photos qu’elle fait avec son Leica. Dans ce livre, deux ans plus tard, la jeune Suissesse rencontre les nomades du Turkestan, les Kirghizes et les Ouzbeks.

La vie des nomades me captive. Leur instabilité m’attire, je la sens mienne comme celle des marins : ils vont, d’une escale à l’autre, partout et nulle part chez eux, chaque arrivée ne marquant somme toute qu’un nouvel appareillage.

Quel humour, lorsqu’elle croque ses rencontres, comme celle du mari d’une nomade Kirghize :

Son mari, cordial et sympathique avec ses trois poils noirs de barbe au menton, me demande naturellement où est mon mari. Chaque fois qu’il me parle, il me tape sur l’épaule, s’imaginant qu’ainsi sa question descendra plus vite dans mon entendement. Il sait quelques mots de russe et nous conversons en petit-nègre.

Impossible de dire qu’elle n’est pas mariée, ses compagnons de voyages, des scientifiques russes, disent aux Kirghizes que son mari, malade, est resté à Moscou.

Elle oscille sans cesse entre la réalité brute et la mise à distance de l’histoire :

Ici l’argent ne représente rien, la seule monnaie d’échange est le mouton, et c’est en moutons qu’ils transforment toutes leurs économies. Le rédacteur kirghize de Karakol m’avait raconté que sa première femme, en 1918, lui avait coûté vingt chevaux. Et je pense qu’en latin, pecunia ­– monnaie – vient de pecus, bétail, et que dans l’Iliade la valeur des boucliers s’exprimait en têtes de bétail…

Ella rencontre des prisonniers politiques, mais leur sort est beaucoup plus enviable que plus tard, lors des grandes purges staliniennes :

­— On m’a déporté après m’avoir accusé de faire partie d’une secte religieuse en formation, ce qui est totalement inexact. À peine arrivé ici, on m’a offert un poste à l’Université et la direction des archives de la ville. Je crois d’ailleurs que la révision de ma condamnation est en bonne voie et qu’on me rappellera à Leningrad. Dans un sens, j’en serai triste, parce que je me suis beaucoup attaché à mon travail ici.

Quelle minutie dans le détail !

Comment on part

Je n’ai plus qu’à partir ; opération difficile, mais j’ai vu comment mes compagnons s’y sont pris. En cours de route, je dépends de la Société de Tourisme prolétarien. Pour moi, le chef de la « base » remplit un formulaire à la date voulue, confirmant ma demande de billet de chemin de fer ; ainsi, j’ai le droit de faire partie des « bronniy billets » (billets cuirassés).

Avec ce papier, on se rend à la gare deux ou trois heures avant l’ouverture du guichet, la veille du départ projeté. Là, une queue est déjà formée. Le premier venu de tous a inscrit sur son carnet les arrivées successives et chacun apprend son numéro d’ordre ; selon le papier qu’on montre, on est catalogué dans une classe particulière.

Ceux qui se tiennent devant le guichet, pâles et lassés, seront les premiers à être servis : des « kurortniy » qui partent en convalescence. Ils sont trois déjà. Puis vient la classe des communistes qui montrent seulement le coin de leur carte rouge de membre du Parti. On n’a pas à leur demander de papiers explicatifs : il est certain qu’ils se déplacent pour des raisons de première importance.

Les « bronniy » dont je suis, forment la troisième classe ; ceux à qui on reconnaît le droit de voyager sans avoir à perdre de temps. Viennent encore les « kommandirovka » envoyés en mission par les services qui les emploient ; en queue, ceux qui voyagent pour eux-mêmes sans dépendre d’une organisation. Pour eux, peut-être bien ne restera-t-il plus de billets : alors ils reviendront patiemment le lendemain.

Voilà à quoi ressemble le récit de la Suissesse : du factuel, du précis. Aucun romantisme, aucune envolée lyrique, même lorsqu’elle se trouve en face de paysages grandioses qui la sidèrent : elle n’est pas là pour donner son propre ressenti, à quelques rares moments près, comme lorsqu’elle risque de basculer dans un ravin.

Aujourd’hui encore son écriture n’est pas démodée parce qu’elle est exempte de coquetteries stylistiques. Les multiples rencontres au cours de son périple sont relatées avec minutie, et c’est un peuple qui se dévoile avec la collectivisation et la sédentarisation forcées. Des peuples en train de perdre leur culture pour ne pas disparaître, force du témoignage. Ella Maillart ne juge ni les uns ni les autres, elle témoigne.

On peut lire Des monts célestes aux sables rouges en empruntant de nombreuses grilles de lectures : témoignage, aventure extraordinaire, journal de voyage, mais en aucun cas on peut rêver à bon marché. Dureté et monotonie du voyage, faim, tensions entre les compagnons de voyage, problèmes techniques, problèmes d’argent, Ella ne nous cache rien. Mais que de choses nous apprenons grâce à son récit factuel : la vie quotidienne, la façon de tuer les animaux, de tanner leur peau, de faire cuire leur chair, de manger, rien n’échappe à son œil attentif !

Et au détour d’un sentier, la description presque involontaire d’un paysage sublime.

Il faut lire ce livre par étapes, accompagner la voyageuse et rendre hommage au sens de l’hospitalité de ceux qui la reçoivent.

Journée des droits de la femme oblige, je recopie le témoignage d’une femme membre du parti communiste qu’Ella rencontre avec des brodeuses ouzbeks :

Il faut faire attention. La libération de la femme crée du mécontentement dans les ménages. Les vieilles qui gagnent s’en moquent. Pour les jeunes, c’est toujours la même rengaine : « Je ne veux pas que tu sortes comme ça », dit l’homme. Nous instituons une petite cour pour juger les scènes de famille. Il faut faire entendre raison au mari qui voit des mauvaises choses partout. Seule l’instruction finira par ouvrir les yeux aux hommes.

C’était en 1932 en Ouzbekistan. Nous savons ce qu’est devenue cette tentative de dévoiler les femmes. Bonne journée à toutes et à tous.

Si vous désirez mieux connaître Ella Maillart, voici quelques liens utiles :

Un très beau témoignage de Charles-Henri Favrod.

Sa biographie qui vaut le détour.

Un bel article des écrivains voyageurs.

Un article du Temps (excellent journal suisse romand) sur la longue vie de cette aventurière extraordinaire.

Des monts célestes aux sables rouges
Ella Maillart
Payot, mai 2001, 358 p., 10,65 €
ISBN : 978-2228894401

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De sang froid, passions et vérité

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Je vous propose de redécouvrir un livre publié il y a cinquante ans et qui a connu une incroyable postérité, le roman-document De sang froid de l’auteur américain Truman Capote. Pourquoi ce roman ? Parce qu’il sort de l’ordinaire, que ce soit par sa qualité ou par les mystères qui l’entourent.De sang froid

Beaucoup de romans, enquêtes ou biographies, ont tenté d’imiter cet objet d’une noirceur incandescente ­– je pense par exemple à L’Adversaire d’Emmanuel Carrère – mais aucun ne l’a jamais égalé, ni par l’intensité de ce qui est relaté, ni par la force de l’investissement de son auteur. Il faut revenir sur la genèse hors normes du plus célèbre roman de l’après-guerre aux États-Unis.

En 1959, dans une toute petite communauté du Texas faisant partie de la Bible Belt, ces vastes étendues dominées par la Bible et ses différentes églises, la famille d’un riche fermier est massacrée peu avant Thanksgiving. Ce fait divers tragique fonctionne comme un déclic pour l’écrivain new-yorkais Truman Capote qui cherche depuis longtemps à tirer la quintessence du journaliste : la restitution de la réalité. Il déclarera plus tard dans une interview :

Le facteur qui a motivé ce choix de sujet – à savoir, écrire un compte rendu véridique d’une affaire criminelle réelle – était entièrement littéraire. Ma décision était fondée sur une théorie que je porte en moi depuis que j’ai commencé à écrire de façon professionnelle, ce qui fait déjà largement plus de vingt années. Il me semblait que l’on pouvait tirer du journalisme, du reportage, une forme nouvelle et sérieuse ; ce que j’appelais en mon for intérieur le roman-vérité.

Il se rend sur place, comme de nombreux journalistes, mais lui, il s’installe pendant plusieurs mois. Ce qui va se passer durant ce temps d’investigation et de maturation de son projet est aussi passionnant que le roman qui va paraître six ans après le quadruple meurtre, en novembre 1966.

Cinquante ans plus tard son œuvre n’a pas perdu de sa force, c’est un coup de poing, et le lecteur, K.O. debout, ne comprend pas ce qui lui arrive. Il connaît pourtant l’histoire, il sait que les assassins étaient de pauvres types qui ont fini pendus, et pourtant de la première à la dernière page il ne peut pas lâcher ce livre.

Le village de Holcomb est situé sur les hautes plaines à blé de l’ouest du Kansas, une région solitaire que les autres habitants du Kansas appellent « là-bas ».

Tout s’enchaîne dans cette narration où alternent les victimes qui ne savent pas qu’elles vivent leur dernier jour et leurs futurs assassins, petites frappes qui se sont rencontrées en prison. La tension dramatique, l’issue fatale, la fuite des assassins et leur traque par le KBI (le Bureau d’investigation du Kansas), le coup de chance improbable qui permet leur arrestation, les interrogatoires, tout est si visuel que le film des événements de Holcomb semblait déjà fait. Il sera d’ailleurs tourné immédiatement après, le film sortant sur les écrans en 1967.

Voilà pour l’aspect roman policier haletant. Mais il y a le roman sociologique, la description intime de cette Amérique qui semble avoir peu changé depuis un demi-siècle, avec ses personnages ancrés dans la Bible et le travail de la terre, ses marginaux perdus et leur misère affective, matérielle et sexuelle. Une Amérique pas si loin de Faulkner, une Amérique aux immenses plaines à blé peuplées de solitude, comme celle de Mrs Clutter, l’épouse dépressive du fermier :

Bien qu’elle fût abonnée à de nombreux périodiques (…), aucun de ceux-ci ne se trouvait sur sa table de chevet, seulement une bible. Un signet était placé entre les pages, un bout rigide de soie moirée sur lequel un avertissement avait été brodé : « Prends garde, veille et prie : car tu ne sais ni le jour ni l’heure. »

Grâce à son immersion totale dans la vie des habitants, le journaliste va comprendre intimement la vie de cette région si éloignée à tous points de vue de New York, pénétrer la vie de la famille Clutter, grâce  au journal de la jeune fille de la maison, Nancy, dix-sept ans, analyser les jeux de pouvoirs entre les différentes églises… Il reconstitue le crime avec une précision et une tension hallucinantes : jusqu’au bout, avant que tout ne bascule, on pense que le drame va être évité. Mais le massacre a lieu, il provoque une onde de choc dans la communauté qui reste persuadée qu’un de ses membres a armé le bras des assassins. Magnifique description du retournement de l’innocence primitive à la méfiance la plus noire :

La mort brutale et sans mobile apparent produisit chez le destinataire moyen (…) un étonnement qui se changea en consternation ; une superficielle sensation d’horreur qu’approfondirent rapidement les sources froides de la peur individuelle.

Le système judiciaire est décrit de l’intérieur (Truman Capote a assisté au procès), système qui peine à reconnaître les troubles mentaux comme circonstances atténuantes.

La règle M’Naghten ne reconnaît aucune forme de folie tant que l’accusé est capable de reconnaître la différence entre le bien et le mal, légalement, non pas moralement. (…) La règle Durham dit simplement qu’un accusé n’est pas criminellement responsable si son acte illégal est le produit d’une maladie ou d’une déficience mentale.

L’issue du procès est inéluctable, mais De sang froid ne s’arrête pas à la condamnation de Perry Smith et Dick Hickock. Truman Capote les accompagne jusqu’au bout, dans une trouble et troublante empathie, en particulier pour Perry Smith, le métis indien à l’enfance dévastée :

La vie de Perry Smith n’avait pas été un lit de roses mais un cheminement pitoyable, sinistre et solitaire vers une série de mirages.

Dans le couloir de la mort, Truman Capote décrit les autres condamnés, eux aussi atteints de troubles mentaux. Le compagnonnage va jusqu’au bout, et le mercredi 14 avril 1965, il assiste à leur pendaison. Il écrit à Alvin Dewey l’enquêteur :

Perry et Dick ont été pendus mardi dernier. J’étais là parce qu’ils me l’avaient demandé. Ce fut une épreuve atroce. Dont je ne me remettrai jamais complètement. Je vous en parlerai un jour, si vous pouvez le supporter.

Car Truman Capote est devenu l’ami de l’enquêteur vedette de son livre qui se termine par une triste envolée lyrique :

Puis, retournant chez lui, il se dirigea vers les arbres, s’engagea sous leur voûte, laissant derrière lui le ciel immense, le murmure des voix du vent dans les blés qui ployaient sous le vent.

Le roman-document paraît en novembre 1966 dans un grand show mondain et commercial d’un goût douteux mais efficace : De sang froid connaît aussitôt un extraordinaire succès (plus de huit millions d’exemplaires vendus). Ce raz-de-marée médiatique et financier fut une sorte de malédiction ; jamais plus Truman Capote n’écrira de roman ;  jamais il ne se remettra complètement de cette affaire. Après De sang froid Truman Capote n’arrivera plus à écrire une œuvre d’une telle puissance. Voyage, femmes, alcool et cocaïne, journalisme plutôt que romans. Était-ce parce que la « vérité-vraie » la compréhension de la différence entre le vrai et le réellement vrai, comme il l’a écrit, était inaccessible ? Était-ce pour une autre raison ?

Truman Capote présente Dewey comme un héros dans son histoire, que ce soit pour la tension de l’intrigue, sa construction dramatique, ou pour des raisons personnelles. Dewey lui a grandement facilité son enquête auprès de la population, méfiante vis à vis des journalistes, mais avec la caution de Dewey, les langues se sont déliées. Dewey lui a permis de rencontrer les assassins en prison, lui a ouvert les documents du KBI, y compris le journal de la jeune Nancy qui donne cet aspect tellement véridique et émouvant à la reconstitution de la vie des Clutter… Des documents confidentiels faisant partie de l’enquête. Pour finir Dewey a attesté le côté véridique du roman de l’écrivain. Les rapports d’amitié perdureront entre les deux hommes, comme le montre l’extrait de lettre au moment de la pendaison des assassins de la famille Clutter, presque cinq ans après les faits. Quand De sang froid sera adapté à l’écran, madame Dewey bénéficiera sur la recommandation de l’auteur du livre d’un poste de consultante grassement rémunéré. Il ne s’agissait sans doute pas d’un retour d’ascenseur cynique mais d’une sorte de climat très particulier autour de cette histoire hors normes par tous ses aspects.

Des documents du Kansas Bureau of Investigation sont sortis de l’oubli fin 2012 à l’occasion d’un procès et ils tendent à prouver que la vérité-vraie de Truman Capote n’était qu’une construction narrative. Il semblerait que l’auteur ait pris certains accommodements avec la vérité. Ceux-ci concernent le détective Dewey qui a mis plusieurs jours avant de vérifier les assertions du prisonnier qui a mis sur la piste des assassins, et ces cinq jours avant de retrouver l’arme du crime chez les parents de Hickock ont peut-être permis l’assassinat d’une autre famille. Circonstances similaires de massacre collectif que Truman Capote insère avec habileté dans le roman, faisant dire à Perry Il y en a qui ont fait comme nous… Façon de camoufler ce qui semble une faute professionnelle ?

Nous nous trouvons, avec De sang froid, dans une histoire gigogne : l’histoire de départ recèle une autre histoire qui mène à une autre histoire. Si vous désirez approfondir le sujet, voici quelques pistes.

Tout d’abord, après la lecture du roman, les bandes annonces des films tout aussi passionnants les uns que les autres méritent vraiment le détour; elles vous donneront envie de voir les films, j’en suis sûre.  Celle du film tiré du livre en 1967 par Richard Brooks se trouve plus haut, on trouve le film en DVD. Il faut ajouter deux films récents (2005-2006) centrés sur la personnalité de l’auteur:

Le film de Bennett Miller, Truman Capote

Celui de Douglas McGrath, Scandaleusement célèbre

Je n’ai pas encore lu la bande dessinée de Chris Samnee et Ande Parks, Capote in Kansas.

Enfin, si vous avez envie de démêler entre vérité et accommodements littéraires, les excellents articles de slate.fr et de litterature.net.

Soixante ans après sa parution, De sang froid n’a pas fini d’agiter les passions. N’est-ce pas un roman-vérité plus passionnant que le meilleur des romans policiers ?

De sang-froid
Truman Capote
traduit de l’anglais (États-Unis) par Raymond Girard
Gallimard, mars 1972, 512 p., 9,20 €
ISBN : 9782070360598

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Umberto Eco, le rire et l’ignorance

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le nom de la roseUmberto Eco vient de mourir, et le Nom de la rose me revient en mémoire, ce roman si riche, si érudit et si profond dont la lecture m’a imprégnée durablement.

Jorge le moine bibliothécaire aveugle d’une très sage abbaye bénédictine est prêt à tout pour que l’unique exemplaire du Rire d’Aristote reste secret :

 Au moment où il rit, peu importe au vilain de mourir ; mais après, quand prend fin la licence, la liturgie lui impose de nouveau, suivant le dessein divin, la peur de la mort. Et de ce livre pourrait naître la nouvelle et destructive aspiration à détruire la mort à travers l’affranchissement de la peur. Et que serions-nous, nous créatures pécheresses, sans la peur, peut-être le plus sage et le plus affectueux des dons divins ? (…) Un philosophe grec (…) dit qu’on doit démanteler le sérieux de ses adversaires avec le rire, et le rire adverse avec le sérieux. La prudence de nos pères a fait son choix : si le rire est le plaisir de la plèbe, que la licence de la plèbe soit tenue en bride et humiliée, et sévèrement menacée.

Le moine Jorge commet des crimes parce qu’il n’a pas étudié à l’université et que son ignorance l’a conduit à un dangereux délire. Les philosophes enseignaient la scolastique qui essayait de concilier la philosophie antique avec la philosophie chrétienne. La philosophie scolastique recherchait les « propria » c’est-à-dire les propriétés distinctives de l’homme, et le rire participe de leur définition de l’homme car les animaux ne rient pas.

Les théologiens s’efforcent de codifier le rire pour différencier le bon rire, celui qui exprime la joie sincère, du mauvais, le rire méchant qui se gausse des malheurs d’autrui. À leur suite, et de manière parfaitement conforme aux éléments de la scolastique, Dante parle de la faculté de rire dans Le Banquet : Dante

Et qu’est-ce que le rire, sinon un étincellement du plaisir de l’âme, c’est-à-dire une clarté apparaissant au-dehors selon ce qui se passe au-dedans ? C’est pourquoi il convient à l’homme (…) de rire modérément, avec honnête sévérité et à petit branle de sa mâchoire.

À petit branle de sa mâchoire… Parce qu’il y a danger si on éclate de rire, le rire est associé au plaisir, à l’excès, ou pire à la cruauté et à la moquerie. Rire est dangereux, pensent les grands mystiques Bernard de Clairvaux et Hildegarde de Bingen, le chrétien ne devrait pas rire, par peur du Jugement dernier. Hildegarde de BingenPour Hildegarde, le rire est le propre du diable. La dérision est l’arme des esprits malins qui ont contesté la suprématie de Dieu. C’est le diable en action qui provoque ce rire irrépressible qui ne peut-être canalisé, ce si justement nommé fou-rire, irruption de l’animalité pour la grande visionnaire du XIIe siècle. Elle associe le rire de l’homme au plaisir charnel d’où la comparaison des larmes de rire avec le sperme… Hildegarde de Bingen a été mise en échec par un démon moqueur lors de tentatives d’exorcisme, ceci explique peut-être cela.

Le Christ a-t-il ri ? Comment le savoir ? Seul le Christ en croix de l’abbaye de Lérins semble sourire et jamais aucun écrit n’atteste le rire du fils de Dieu.christ-souriant-detail

N’empêche, le rire s’insinue dans la religion et la vie religieuse : Jacques le Goff avait parlé des « Jeux de moines » attestés depuis le haut Moyen Âge. C’était des séries de devinettes proposées dès le VIe siècle aux moines en dehors des moments imposés de silence. De nombreux manuscrits de ces Joca monachorum nous sont parvenus. C’est devenu nettement moins biblique à la fin du Moyen Âge avec des livres de devinettes. Le rire envahit les églises au XIIIe siècle, quand les prédicateurs tiennent leur public en haleine en lui faisant tour à tour peur et rire, et comme le rire marche mieux que la peur pour déplacer les foules, certains sermons dérapent vers un comique qui n’a plus grand chose à voir avec la religion…

Au cours de ce même XIIIe siècle qui voit l’apogée de la chrétienté et une extraordinaire embellie de la vie quotidienne, apparaissent le théâtre comique et les fabliaux, les farces et les sermons parodiques. Le rire envahit l’espace public, rire de petites gens sur le parvis des églises, rire des bourgeois avec les fabliaux, rire des élites avec le Décaméron de Boccace ou les Cent nouvelles nouvelles qui pillent sans vergogne l’ouvrage de Boccace. Le rire plutôt que l’ascétisme.

Umberto Eco, érudit de la philosophie médiévale, en choisissant comme assassin un moine bibliothécaire capable de tuer pour qu’un livre de philosophie sur le rire ne soit pas diffusé, montre que la bêtise et l’ignorance sont les plus grands dangers auxquels sont confrontés l’espèce humaine.

Est-ce la raison pour laquelle, peu de temps avant de mourir, il a quitté sa maison d’édition qui était passée sous la houlette de Bernasconi ? Beau séjour, cher Umberto, dans le paradis des érudits.

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« Une vie entière » donne un magnifique roman

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Les cicatrices sont comme les années, elles s’accumulent petit à petit, et tout ça finit par faire un être humain.

Une vie entière

Une vie entière

Les cicatrices viennent après la blessure, après les coups physiques et les coups du sort, ceux qui font chanceler l’être humain avant de faire partie de son histoire. Andreas Egger appartient au monde des obscurs, des petites gens si admirablement décrits par Flaubert dans Un Cœur simple dont la trame de départ ressemble à celle du livre de Robert Seethaler : même début de vie pour Félicité et Andreas, tous deux recueillis par un paysan qui les bat, tous deux cœurs simples sans amertume et amoureux du travail bien fait.

Il y a une longue filiation de ces descriptions de vie exemptes de romanesque, de Flaubert à Pierre Michon ou Marie-Hélène Lafon. Dans la littérature contemporaine, ces vies s’inscrivent dans l’histoire et l’évolution de la société. Chez Robert Seethaler, Le Tabac Tresniek parlait déjà des changements en Autriche pendant la seconde guerre mondiale, et le héros était un jeune garçon modeste. La comparaison avec Une vie entière s’arrête là tant l’envergure du deuxième roman surprend par son ampleur.

On suit Andreas Egger de son arrivée dans ce village de montagne au pied des Alpes au début du vingtième siècle à sa mort dans une cabane au-dessus du village presque quatre-vingts ans plus tard :

Enfant, Andreas Egger n’avait jamais crié de joie, voire crié tout court. Jusqu’à sa première année d’école, il n’avait même pas vraiment parlé. Il s’était constitué non sans peine un petit pécule de mots qu’il se disait tout haut en de rares moments et assemblait au hasard. Parler voulait dire attirer l’attention, ce qui pour le coup ne présageait rien de bon. Quand, un beau jour de l’été dix-neuf cent deux, on l’avait hissé hors de la voiture qui l’amenait d’une ville située au-delà des montagnes, le petit garçon était resté coi, levant de grands yeux étonnés sur les cimes d’un blanc irisé. Il pouvait avoir environ quatre ans alors, peut-être un peu moins, ou un peu plus. Personne ne le savait exactement, personne n’en avait cure, et c’était bien le cadet des soucis du fermier Hubert Kranzstocker qui réceptionna le petit Egger à contre-cœur (…).

Durant cette existence difficile si admirablement décrite, on suit l’évolution de la vie dans les Alpes Autrichiennes : l’installation des téléphériques, le nazisme, la guerre, la transformation de l’agriculture de montagne en activité touristique… D’autres encore comme l’arrivée de l’électricité, de la télévision, le spectacle des hommes qui marchent sur la lune…

La population du village avait triplé depuis la guerre et le nombre de lits presque décuplé, ce qui amena la commune à entreprendre, outre la construction d’un centre de vacances, avec piscine couverte et jardin thermal, l’agrandissement du bâtiment scolaire qui s’imposait depuis longtemps.

Robert Seethaler parle également d’un épisode habituellement passé sous silence, à savoir le fait que des soldats allemands sont restés prisonniers en U.R.S.S. jusqu’en 1951.

Egger, rendu boiteux à la suite des sévices du paysan Kranzstocker, possède une grande force physique et ne connaît pas le vertige ; il participe à l’installation puis à l’entretien des pylônes des téléphériques. Dans la dernière partie de sa vie il deviendra guide de montagne pour les touristes.

Manifestement, les gens venaient chercher dans les montagnes quelque chose qu’ils croyaient avoir perdu ils ne savaient quand, longtemps auparavant. Il ne comprit jamais de quoi il s’agissait exactement, mais, les années passant, il acquit la certitude qu’au fond ce n’était pas lui que les touristes suivaient de leur pas mal assuré, mais quelque insatiable nostalgie inconnue.

Cette nostalgie n’envahit pas que les touristes. Elle submerge le lecteur, ébloui par l’extraordinaire et spectaculaire demande en mariage de Egger à Marie la servante de l’auberge, et bouleversé par la fin tragique de l’éclaircie dans la vie d’Andreas Egger. Car on s’attache très vite à ce taiseux, comme on s’était attaché par exemple au Joseph de Marie-Hélène Lafon, même si les deux livres se situent aux antipodes l’un de l’autre tant le style de leur auteur respectif est différent.

La vie fracassée dès le départ du petit Andreas, cette vie d’orphelin vouée à l’exploitation, nous bouleverse pour d’autres raisons que cette version moderne des Misérables. Parce qu’elle est universelle. Parce que, au-delà du cas particulier du petit autrichien du début du vingtième siècle, c’est notre propre vie que nous apercevons en filigrane, cette vie qui nous échappe au milieu des évolutions technologiques qui vont de plus en plus vite.

Comme tous les êtres humains, il avait, lui aussi, nourri en son for intérieur, pendant sa vie, des idées et des rêves. Il en avait assouvi certains, d’autres lui avaient été offerts. Beaucoup de choses étaient restées inaccessibles ou lui avaient été arrachées à peine obtenues. Mais il était toujours là. Et dans les jours qui suivaient la première fonte des neiges, quand il traversait le matin le pré humide de rosée devant sa cabane et s’étendait sur une des dalles rocheuses qui le parsemaient, avec dans son dos la fraîcheur de la pierre et sur le visage les premiers chauds rayons de soleil, il avait l’impression qu’il ne s’en était tout de même pas si mal tiré.

Lisez cette Vie entière, avec émotion, avec respect, et admiration.

Une vie entière
Robert Seethaler
traduit de l’allemand (Autriche) par Élisabeth Landes
Sabine Wespieser, octobre 2015, 160 p., 18,00 €
ISBN : 978-2-84805-194-9

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Naissance d’un père et tempête de souvenirs

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Naissance d'un pèreNaissance d’un père de Laurent Bénégui vient interrompre la succession de livres drolatiques à l’activité effrénée où un personnage apparemment normal se trouve confronté à des situations invraisemblables qui suscitent l’hilarité du lecteur. Jusque-là le héros d’un roman de Bénégui s’exprimait à la première personne, et ce « je » pourtant opérait une mise à distance du lecteur, comme l’impression de se trouver au cinéma en train de regarder le héros se dépatouiller avec la pagaille qu’il a suscité. Avec Naissance d’un père, c’est tout l’inverse. Le héros de l’histoire est mis à distance du narrateur et pourtant ce « il » est terriblement intime, renvoie le lecteur à sa propre histoire, supprime la distance.

Naissance d’un père, livre oxymore universel.

Le titre en lui-même est un superbe oxymore qui nous éclaire sur le contenu du livre. On donne naissance à un enfant, bien sûr, mais qui s’est intéressé à la façon dont on devient père ? C’est bien une façon de naître, puisque c’est un nouvel individu qui apparaît avec l’irruption d’un enfant dans sa vie.

L’argument de départ est simple : Romain, chauffeur de taxi, partage la vie de Louise, violoncelliste dans un orchestre qui va bientôt accoucher d’une petite fille. Mais nous sommes chez Bénégui, et cela ne peut bien sûr pas rester longtemps paisible. Les heureux futurs parents ont une histoire compliquée bien actuelle. Tout d’abord le bébé était déjà conçu lorsque Louise a rencontré Romain par l’intermédiaire de sa meilleure amie, harpiste dans l’orchestre et sœur de Romain. Demi-sœur plus exactement, et c’est important : le père de Romain, grand mathématicien, a eu trois enfants avec trois femmes différentes avant de disparaître dans la nature. Maya, Romain et Shirley Longueville n’ont pas eu de père, mais l’absent hante leur vie. Les deux jeunes femmes passent d’une aventure insatisfaisante à une autre, et leur frère, ancien grand sportif qui a abandonné la compétition après un accident semble tout aussi fragile. Demi-famille, enfants instables. Au fond un miroir de notre société.

Louise avant sa rencontre avec Romain semblait tout aussi perdue, elle aussi passait d’une aventure à l’autre, sans se protéger parce qu’elle pensait ne pas pouvoir avoir d’enfant suite à trois avortements. Fragilités diverses et au milieu de tout cela, la grossesse de Louise. Romain est resté parce qu’il aime Louise, mais cet enfant qui a poussé dans son ventre c’est autre chose… Louise pense que c’est difficile parce qu’il n’est pas le géniteur, Romain a peur de se sauver comme son père l’a fait.

Ainsi, ligne après ligne, sur les feuilles où Louise consignait ses idées, les Chloé, Éva, Emma, Léone, Alessia, Gabrielle, Paloma ou Clara avaient défilé, lui chuchotant tour à tour qu’il n’était pas leur père. Et aucun prénom ne lui avait épargné ce refrain.

Arrive une  énorme tempête qui va tout bousculer : Louise se retrouve en salle de travail avec une autre parturiente, Sandrine Brunoy ; après bien des péripéties Romain se retrouve seul avec les deux femmes qu’il va devoir aider à mettre au monde leur enfant respectif.

Il découvrit Louise, de dos, sur la table de travail, allongée sur le flanc, repliée sur son ventre douloureux, expirant à petites bouffées rapides. Des câbles électriques émergeaient sous l’étoffe bleue, reliés à l’imprimante sur laquelle l’aiguille traçait une courbe dont la pente allait croissante.

— Louise, ça va? se rua-t-il en lui attrapant le bras.

La femme se retourna et révéla son regard, brouillé par la souffrance et la surprise, ses traits crispés entre les mèches brunes collées par la sueur. Ce n’était pas Louise.

Alessia naît la première, la fille de Louise va bien. Inès arrive ensuite, et là c’est différent.

Le reste, vous le découvrirez dans ce beau roman initiatique. Bien sûr il y a des scories comme les scènes de sexe stéréotypées ou des phrases trop hâtivement écrites qui frisent le cliché, mais le reste est plein de sincérité, de pudeur et de justesse dans les sentiments humains. Tous les hommes se reconnaîtront dans cette difficulté à se sentir père, à appréhender tout ce que ce ventre qui s’arrondit va bouleverser dans leur vie, le fait de passer après, de gravir un échelon dans leur existence. Toutes les femmes se reconnaîtront dans cette espèce de flottement, de déception face à leur compagnon qui n’adhère pas comme elles le désireraient à cet incroyable bouleversement de leur existence.

On rit parfois, comme le moment où Louise, au milieu du déluge, dit « J’ai perdu les eaux », du Bénégui pur jus… Mais on est le plus souvent bouleversé par la finesse et l’exactitude de l’analyse des désarrois humains. Pour ma part, pour des raisons d’histoire familiale, je n’ai pas ri longtemps. Donner la vie, c’est parfois donner la souffrance puis la mort, et rien ne prépare les futurs parents à cela. Mon mari, quant à lui, après avoir beaucoup ri à des moments qui me semblaient étonnants et typiquement masculins, après avoir revécu de l’intérieur ses angoisses lors des grossesses de sa femme, a pleuré face à ce qui nous ramenait à notre drame personnel. Monsieur Bénégui, ce livre est très différent de ce que vous écrivez d’habitude. J’ai aimé vos livres précédents mais celui-ci m’a touchée profondément. Ce que vous offrez à vos lecteur, c’est un moment de leur vie.

Vous êtes préparées à donner la vie, poursuivit le docteur Mauduis. On vous le répète depuis que vous êtes petites et le jour où vous avez vos règles, on vous explique que ça y est, vous êtes devenues des femmes puisque vous pouvez devenir mères… Alors que la société conforte vos homologues masculins dans l’idée que leur participation au processus est assez accessoire et plutôt brève. Croyez-moi, j’ai vu un paquet de types qui n’ont réalisé ce qui leur arrivait qu’en posant un pied dans cette salle. (…) Au fond, les hommes ont aussi quelque chose à faire naître ce jour-là. conclut-il en se redressant.

Naissance d’un père, livre oxymore universel, est-il écrit plus haut. Une femme transmet la vie à son enfant mais son compagnon ne connaît pas la transformation intime de la mère, cet échange entre l’enfant qui grandit et la prépare à son rôle. Un homme naît à la paternité plus tard, il doit apprendre son rôle et devenir ce qu’il doit être. Il doit grandir d’un coup s’il est encore « adulescent », il sait que cette vie fragile qui vient bousculer sa vie l’occupera jusqu’à sa mort à moins d’une fuite devant ses responsabilités. Le personnage de Romain, pris dans ses contradictions et son dilemme, va grandir grâce à une tragédie qui ne le concerne pas.

L’oxymore du titre résume une contradiction fondamentale : donner la vie et perdre ce que la sienne avait de fermé sur elle-même.

Alors, me direz-vous, est-ce du Bénégui, ce médicament contre la morosité ambiante ? Bien sûr, parce qu’on ne se débarrasse pas facilement de ce qui fait votre marque de fabrique : le torrent d’images (Alessia ne pouvait naître qu’au cœur d’une tempête), de situations à la fois cocasses et surréalistes, de jeux de mots un peu salaces, mais à doses beaucoup moins importantes que dans les romans précédents. Ce qu’on a perdu en éclats de rire on l’a gagné en émotions et en retour sur sa propre vie, je ne pense pas que l’on soit perdant.

Naissance d’un père
Laurent Bénégui
Julliard, février 2016, 238 p., 18 €
ISBN : 978-2-260-02222-0

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