Il émerge d’innocentes pousses vert tendre, rugissant, prêt à engloutir les petits d’humains qui s’éloigneraient de leur mère. Son groin hideux s’ouvre sur un désastre intérieur : qu’a-t-il dévoré avant de terrifier celui qui a le malheur de le croiser ?
Yeux terribles, de guingois dans un chaos d’épouvante. L’arcade sourcilière proéminente de son œil droit inquiète autant que le cerne prononcé qui le souligne : la créature ne dort pas bien, tourmentée par des cauchemars antédiluviens. Le côté gauche pétrifie : d’où vient cette excroissance qui ressemble à une tumeur et rend l’œil vitreux ? Le cyclope né d’une sauvagerie végétale s’apprête à frapper, bras droit levé.
Ce monstre immobile dressé dans une parade tragique ne fait peur à personne, les enfants crient et leurs mamans rêvent, elles se laissent bercer par le soleil dans le jardin public de Funchal. Le tronc de ce Choriza Speciosa recèle également une magnifique oreille visible sur ce cliché, en bas à gauche, et un petit monstre curieux qui observe les petits avec leur pelle et leur seau, ses deux pattes devant lui comme s’il avait envie de les rejoindre pour jouer. Une bouche dédaigneuse et nombre d’éléments anthropomorphiques peuplent également le tronc tourmenté mais personne ne les regarde, à part les spectateurs munis d’une imagination débridée. Jouez, enfants, et rêvez, mamans, l’heure est paisible. Ce soir, avec les ombres de la nuit, c’est une autre histoire…