Évadée de l’EHPAD au volant d’un camion de pompiers

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Véhicule de secours et assistance aux victimes

Kevin. B, CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons

L’histoire d’Amandine Berthet s’évadant de sa maison de retraite pour rentrer chez elle, puis réaliser enfin un de ses rêves les plus chers a semblé de la fiction à nombre de lecteurs. Parfois la réalité dépasse la fiction : fin mars une retraitée s’est évadée de sa maison de retraite au volant… d’un camion de pompiers. Elle a profité, comme Amandine dans mon roman, de ce moment propice qui ne se reproduira sans doute jamais et qu’il faut saisir.

Le samedi 27 mars, rapporte le Progrès de l’Ain, les pompiers sont appelés dans une résidence de Châtillon-sur-Chalaronne pour porter secours à un résident de l’EHPAD La Montagne. Une résidente qui n’a pas perdu tout sens de l’observation constate que dans leur précipitation les pompiers ont laissé la clé de contact. Aussitôt, alors que tout l’établissement est occupé à porter secours ou à regarder les pompiers s’activer, elle se glisse dans le camion, le met en route et se sauve.

Elle veut retourner chez elle, comme Amandine dans Par la fenêtre.

La sidération passée, les pompiers préviennent la gendarmerie et une course poursuite d’environ une demi-heure s’engage entre le véhicule de la gendarmerie et celui des pompiers conduit par une femme de soixante-cinq ans qui est censée ne plus avoir toute sa tête.

Cet article fait rire, puis émeut et enfin interpelle.

Nul doute que cette femme se trouve dans cet EHPAD pour d’excellentes raisons, mais elle connaît des moments de lucidité suffisamment longs pour être capable d’initiative et d’audace. Elle a conduit un camion de pompiers pendant une demi-heure sans causer d’accident, malgré le stress d’avoir la gendarmerie à ses trousses. Une demi-heure avec un véhicule représentant les forces de l’ordre, gyrophare allumé, qui veut vous forcer à vous arrêter, c’est long. Le trajet aussi. Elle a trouvé le chemin. Elle y était presque.

La police a réussi à l’arrêter près de sa maison. Comme Amandine, le rêve impossible de reprendre sa vie d’avant a échoué. J’imagine la tête des nouveaux occupants ou du reste de la famille si elle avait pu garer le camion devant la maison et sortir en disant avec un lumineux sourire : « Me voilà, je suis revenue ». J’ai retrouvé ma vieille dame chez cette pensionnaire, et j’espère de tout cœur que son désir poignant, intense, de retrouver sa vie fragmentée par la routine de l’EHPAD, sera adouci jusqu’à l’oubli qui seul lui apportera consolation.

Les gendarmes l’ont amenée à l’hôpital de Villefranche, ses propos étaient, semble-t-il, incohérents. Effet du stress ? De l’affolement devant l’énormité de ce qu’elle avait accompli ? Retour en masse des troubles qui avaient causé son placement ? Elle a passé la soirée à l’hôpital avant d’être raccompagnée à la résidence La Montagne par les sapeurs-pompiers. L’article ne précise pas s’il s’agit de ceux à qui elle avait emprunté le camion.

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Une réflexion sur « Évadée de l’EHPAD au volant d’un camion de pompiers »

  1. alainx

    Voilà une histoire singulière, digne d’une séquence dans un film comique.
    Mais aussi tellement émouvante de ce désir de fuir le mouroir où on est assigné à résidence définitive.
    Surtout lorsque tout le monde considère qu’on est là « pour de bonnes raisons »…
    Souvent on parle d’un « placement à vie ». Ce serait plus juste de dire « placement à mort »

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