C’était ce week-end, à la fin des vacances scolaires genevoises et en plein milieu des vacances scolaires françaises. Impossible de déplacer la date, il y a tant de manifestations !
Les auteurs pâtissent de cette situation, eux qui sont venus nombreux à ce rendez-vous littéraire. Nous étions une soixantaine, dont certains habitent parfois fort loin ce qui leur occasionne des frais pas si annexes que cela : transport, logement, repas du soir. Le déjeuner offert par la municipalité et la gentillesse de tous les bénévoles sont appréciés par tous, mais ne compensent pas le lourd investissement de ceux qui sont venus montrer leur travail, sortir de la solitude de l’écrivain pour rencontrer celui à qui on destine tous ces efforts, le lecteur et le plus souvent la lectrice.
Chacun éprouve la nécessité de faire découvrir son univers, aucun millionnaire parmi nous, seulement des individus pour qui l’écriture est un besoin, une partie intégrante de leur personnalité. Chacun possède une singularité, impossible de le réduire à une catégorie. Tous aimeraient vendre leurs livres, bien sûr, ils sont venus pour ça, mais ils voudraient avant tout échanger avec les visiteurs, leur expliquer ce qu’ils font, comprendre ce qui les touche ou leur indiffère. Las, les visiteurs ne sont pas très nombreux, et ils sont encore plus rares à s’arrêter, prendre un siège pour lire tranquillement les quatrièmes de couverture et poser des questions à l’auteur. Lorsque cela arrive, ce dernier s’épanouit, s’anime avec passion, parle de ce qui le touche tant. Après l’échange, le visiteur peut remercier, aller à la rencontre d’une autre sensibilité, d’une autre écriture, c’est le but d’un salon du livre, cette découverte. L’achat n’est pas obligatoire, il faut que les personnes qui font l’effort de se rendre dans un salon du livre le comprennent. Si on a pris le temps de sortir de chez soi, de marcher un moment, ou de prendre les transports en commun, ou sa voiture avec les difficultés pour se garer, c’est que l’on a envie d’être surpris, loin des gondoles publicitaires et des parcours commerciaux balisés. Alors pourquoi passer d’un air indifférent comme si les auteurs qui attendent un échange entre passionnés de la lecture étaient transparents ?
Les écrivains des salons, que ce soit leur premier roman ou leur dixième, ont soif d’échanges. Ils ne mordent personne, ils n’obligent personne. Qu’on se le dise !
Les salons sont pourtant nécessaires, parce que lorsqu’un lecteur (une lectrice) repart avec un de vos livres et revient l’année suivante pour vous en acheter d’autres parce qu’elle a aimé votre univers, c’est une merveilleuse récompense : vous avez été reconnu(e), et cela annihile tous les moments de solitude.